Culture du lin
Le lin, (linum usitatissimum) est la plante de cette classe qui donne la filasse la plus fine, et dont on se sert le plus ordinairement pour la fabrication du linge.
Ses graines servent à faire de l’huile et ont certaines utilisations dans la médecine naturelle. Elles servent aussi comme nourriture pour certains animaux.
Climat et sol
Le lin se plaît sous les climats tempérés, plus humides que secs.
La culture du lin est très répandue dans la Basse-Saxe, les Pays-Bas, le nord de l’Allemagne, et les états autrichiens; on le rencontre plutôt dans les pays de montagne, comme la Bohême, la Silésie et la Carinthie, que dans les pays de plaine; et cela pour deux raisons: la première, c’est que le lin réussit mieux sur les lieux élevés et les coteaux que dans les pays plats; la seconde, c’est qu’il fournit aux habitants des montagnes un objet de négoce pour l’hiver.
Ce qui prouve que cette plante demande un climat frais et une exposition élevée, c’est qu’autrefois en Allemagne les seigneurs des pays de plaine se réservaient presque toujours le droit d’ensemencer en lin une certaine étendue du terrain que leurs vassaux cultivaient sur les montagnes. On en sème beaucoup dans les provinces irriguées de la Lombardie. Les irrigations peuvent seules en rendre la culture avantageuse dans des contrées aussi chaudes. J’ai remarqué ça et là dans les provinces de Como, de Brescia et de Padoue quelques pièces de terre ensemencées en lin; mais il y tient mal, et ne donne qu’un mince produit.
Le lin se cultive encore avec succès en Suisse, dans la vallée de l’Inn, sur le plan de Selva, à une hauteur de plus de 1600 mètres au dessus du niveau de la mer.
Le lin se plaît dans une terre profonde, friable, plutôt légère que compacte, et riche en humus.
Le lin réussit parfaitement après une plante piochée et fumée, ou après une chenevière : car le terrain est encore assez fertile, et se trouve bien nettoyé, ce qui rend la culture du lin moins dispendieuse que s’il était envahi par les mauvaises herbes; mais c’est surtout dans les novales riches et bien garnies d’humus, et à leur défaut dans des trèfles rompus, qu’il réussit le mieux. On risque de le voir verser quand on le sème dans une terre nouvellement fumée, à moins que la fumure ne soit faible, et qu’on ne mélange exactement, pendant l’automne, l’engrais avec le terrain.
En Lombardie on ensemence toujours en lin les prairies soumises à l’assolement; on les rompt en automne, et on les ensemence en mars sans leur donner de second labour. Si l’on sème le lin sur les chaumes du froment d’hiver, on donne au terrain deux ou trois façons pendant l’été, pour le nettoyer et l’ameublir convenablement.
Dans la Flandre française le lin se sème après le trèfle, les fèves, et quelquefois après les pommes de terre. On le remplace la même année par des choux, des navets, des carottes, etc… et l’année suivante par du trèfle, du blé, du seigle, et autres céréales.
Culture du lin de nos jours :
Préparation du terrain :
Le terrain dans lequel on veut semer du lin doit être préalablement nettoyé et ameubli par plusieurs labours.
La propreté du terrain est une condition indispensable de la réussite du lin. Plus on a mis de soin à le préparer, moins le sarclage est dispendieux par la suite, et plus le produit net est considérable.
Ou ne voit nulle part, dit M. Cordier, des jardins disposés avec autant de soin et de régularité que les champs de lin des environs de Lille; on n’y remarque ni plantes étrangères, ni traces de racines, de paille ou de fumier. La terre est tellement unie, et le grain en est si fin, qu’on croirait que l’on a recouvert la semence avec de la terre passée au tamis, ainsi qu’on le pratique sur le semis des graines les plus délicates des arbres étrangers.
Ensemencement du lin
L’époque de l’ensemencement varie suivant le climat et le délai que demande la préparation du terrain. On peut le semer aussitôt que les gelées ne sont plus à redouter. Il est encore temps de le faire au commencement de juillet dans les contrées où le seigle se récolte à la fin de juin.
Le lin n’est pas sensible aux gelées blanches; les fortes gelées peuvent seules le faire périr. On le sème ordinairement en avril. Dans les pays plus chauds, on le sème dès le mois de mars.
Comme le lin n’occupe le terrain qu’une petite partie de l’année, on peut le cultiver comme première production et comme récolte dérobée. On peut semer après le lin précoce des choux-navets, du millet, des haricots, etc., et semer le lin tardif après des vesces fauchées en vert, des choux-navets ou des betteraves.
On a en Lombardie un lin d’hiver qui se sème vers le 20 septembre, et se récolte au commencement de juin.
Le lin se sème à raison de 20 à 30 décalitres par hectare; on herse le terrain, et l’on y passe ensuite le rouleau.
En Lombardie le lin d’hiver se sème à raison de 20 décalitres, et le lin de mars à raison de 26 décalitres par hectare.
Le lin demande à être semé épais : car ses plants sont petits et peu rameux. Il me semble que le semis serait trop clair si l’on semait moins de 20 décalitres; mais que 5o décalitres sont une prodigalité qui ne peut qu’être nuisible au développement de la plante.
Culture du lin d’hiver de nos jours :
Culture du lin
Le lin doit être soigneusement délivré, par le sarclage, des mauvaises herbes qui pourraient l’inquiéter pendant sa végétation.
Dans la Flandre française, où la culture du lin a été portée au dernier degré de perfection, on le sarcle trois ou quatre semaines après qu’il a été semé; sa tige est alors haute d’environ 4 centimètres : une rangée de personnes, au nombre de dix à vingt, et quelquefois davantage , se mettent en ligne à une distance de 90 cm les uns des autres, enlèvent toutes les herbes à la main, et donnent au terrain une légère culture à l’aide d’une petite houe. Les ouvriers doivent quitter leurs souliers pendant ce travail, pour ne pas meurtrir la plante délicate. La même opération se renouvelle au bout de huit à dix jours, et aussi souvent qu’on le juge nécessaire.
Dans les terrains d’une grande fertilité on empêche le lin de verser en divisant le champ en plates-bandes plus ou moins étroites sur lesquelles on élève des perches qui forment une espèce de réseau solide au travers duquel le lin s’élance et trouve un appui contre la pluie et les vents. On donne le nom de ramé au lin traité de cette manière.
En Flandre la terre destinée au lin ramé est labourée et fumée avant l’hiver; an mois de mars, ou plus tôt si la saison le permet, on laboure de nouveau à sillons très profonds; quelques jours avant de semer on répand sur la terre un peu de fumier de pigeon; après avoir semé la crame de lin, on l’enterre à la herse, et l’on passe le rouleau. Lorsque le lin a atteint 12 à 15 cm, on le sarcle avec beaucoup de soin, et on le rame ensuite de cette manière : sur les bords des sillons ou des planches on plante en terre des piquets assez gros, en forme de fourches, et hauts de 15 cm hors de terre. On établit ensuite sur ces piquets des perches qui traversent les planches; ces perches sont croisées avec de petites baguettes, de manière que le tout ressemble à un grillage. A mesure que le lin pousse, ses tiges passent à travers les trous, et y trouvent un appui contre les vents et la violence des pluies; les racines se trouvent aussi à l’abri de la chaleur, qui les dessécherait, et d’une humidité excessive, qui les ferait périr. Le produit du lin qui végète de la sorte est considérable.
Pour avoir une filasse de belle qualité, il faut arracher le lin aussitôt que les graines sont formées dans les capsules.
Récolte
On diminue l’adhérence de la filasse à la partie ligneuse de la tige, en faisant passer les plants au premier degré de putréfaction. On y parvient, soit en les faisant macérer pendant plusieurs jours dans des fosses remplies d’eau, soit en les étendant sur un pré ou ils demeurent exposés pendant quelques semaines à l’influence de l’air, de la pluie, de la rosée et du soleil. Le premier procédé est expéditif et donne de la filasse blanche; mais il occasionne beaucoup de travail, et n’est pas sans danger. Le second est peu pénible et demande peu d’attention; mais il est assez lent, et donne une filasse grise.
Il est difficile de décider d’une manière générale lequel de ces deux procédés mérite la préférence. Dans les localités où les plantes textiles se cultivent en grand, et où l’on n’a pas d’endroit commode pour les étendre, il faut nécessairement avoir recours au rouissage dans l’eau. Il me semble néanmoins que le chanvre doit être roui dans l’eau, et le lin à la rosée.
Le rapport du lin en filasse varie de 500 à 500 kilogrammes par hectare, suivant qu’il a été plus ou moins bien cultivé et fumé, et selon que l’espèce qu’on a semée a la tige plus ou moins longue.
Le lin qu’on laisse parvenir à sa complète maturité donne 8 1/2 à 11 hectolitres de graines par hectare.
Il y a deux sortes de lin : l’une dont la capsule éclate d’elle-même lorsque, étant parvenue à sa maturité, elle est desséchée par les rayons du soleil; l’autre dont la capsule reste fermée. La graine de la première est sujette à se disséminer, aussi sa culture est-elle moins avantageuse, quoiqu’elle donne une filasse plus fine.
Le lin de Russie ou de Riga est une variété qui se distingue du lin ordinaire par la longueur de sa tige, le petit nombre de ses branches latérales, et surtout par la finesse et l’abondance de sa filasse.
On regarde généralement comme une condition essentielle de la réussite du lin de Riga l’obligation d’en renouveler la semence tous les deux ou trois ans.
L’expérience prouve en effet que cette plante s’abâtardit promptement sous notre climat; mais cette dégénération est moins l’effet du sol et des circonstances locales que le résultat du mode de culture et de récolte en usage dans nos contrées : car, le lin se semant très épais, les plants sont nécessairement étiolés, et ne donnent que des graines avortées ou mal nourries. D’ailleurs on l’arrache encore vert, et avant la maturité de la graine, pour obtenir une filasse plus fine et plus souple.
Sur les bords de la Baltique, où cette graine est un objet de négoce très important, on agit avec beaucoup plus de précautions. On sème très clair le lin que l’on destine à la production de la semence, et presque toujours sur un terrain nouvellement défriché, et dont on a écobué la superficie. On le laisse parvenir au dernier ternie de la maturité, et l’on sacrifie la beauté de la filasse à la qualité de la graine. On coupe alors les branches qui portent la semence, on les suspend dans un lieu bien aéré, pour en opérer la complète dessiccation, et ensuite on les bat,
L’expérience, dit Thaer, conseille de conserver la semence de lin pendant deux ans. Quelques personnes pensent qu’elle est d’autant meilleure qu’elle est plus vieille.
La bonne graine est arrondie, luisante, lourde, s’enflamme promptement, et pétille sur les charbons ardents. Celle qui n’est pas mûre est légère , terne et plus aplatie.