Biner aujourd’hui

Sarcler : technique et utilité du sarclage des anciens

Le sarclage est une opération aussi importante que négligée dans le potager; il consiste à enlever les mauvaises herbes des semis, à la main, lorsque les semis sont très jeunes et très serrés, et avec le sarcloir lorsqu’ils sont plus forts. On donne avec le sarcloir une façon équivalant à un binage.

En principe, il ne doit jamais exister de mauvaises herbes, ni de plantes étrangères dans les semis destinés au repiquage, ni dans les planches ensemencées à la volée. C’est dire que nous proscrivons de la manière la plus absolue cette déplorable coutume de semer des salades, des laitues surtout, dans les planches d’oignons et de carottes. Les laitues tallent au milieu du semis principal et l’étouffent, pour ne fournir que du plant déplorable ; elles retardent considérablement la récolte des oignons et des carottes pour donner quelques salades médiocres et tardives.

Dès que les semis sont bien levés, on fait un premier sarclage à la main, c’est-à-dire qu’on arrache une à une toutes les mauvaises herbes, et l’on doit bien se garder de les laisser devenir plus fortes que les plantes semées, sous prétexte que l’herbe est trop petite ou qu’il fait trop sec. La mauvaise herbe n’est jamais trop petite pour être détruite; elle pousse avec une rapidité excessive lorsqu’on la laisse au milieu des semis. Cette végétation luxuriante a lieu au détriment des plantes semées dont elle a absorbé les engrais, et bientôt elle vient les étouffer avec ses larges feuilles et ses longues racines. Il existe encore un inconvénient grave quand on attend aussi tard pour sarcler; une partie des racines casse, et l’herbe repousse. Quand la racine est arrachée toute entière, les plantes qui l’environnent sont presque déracinées et souffrent beaucoup.

La sécheresse est un prétexte inadmissible pour empêcher le sarclage. Avec quelques arrosoirs d’eau on humecte la terre, et les herbes s’arrachent parfaitement.

Le premier sarclage doit être donné aussitôt que les mauvaises herbes se montrent, on arrose avant, si le sol est trop sec, et après pour rattacher à la terre, les racines qui ont été ébranlées.

Il est utile d’éclaircir les places où il y a trop de plant, en faisant le premier sarclage.

Dès que les mauvaises herbes repoussent, on sarcle de nouveau, mais cette fois avec le sarcloir, instrument très commode et très expéditif.

On peut détruire les mauvaises herbes et éclaircir avec le sarcloir, et de plus, le binage, opéré très superficiellement avec cet instrument, ameublit la terre, la rend perméable, et rechausse les plantes. Il est bien rare de donner un troisième sarclage quand les deux premiers ont été bien exécutés, et surtout faits à temps. Les sarclages sont peu dispendieux, ils avancent considérablement la récolte, et en augmentent énormément la qualité et la quantité.

Pour les semis en ligne, ceux destinés au repiquage, le sarclage entre les lignes se fait avec le sarcloir, on n’arrache à la main que les herbes mêlées au plant.

Biner : technique et utilité du binage

Le binage se fait avec des instruments à lame et à dents, avec des binettes, pour les plantes assez éloignées et avec des serfouettes de différentes grandeurs pour les repiquages en pépinière, et les plantes rapprochées.

Le binage est une opération très importante, il contribue puissamment au succès de toutes les cultures. On le considère généralement comme une opération uniquement destinée à détruire les mauvaises herbes; c’est une erreur profonde. Le binage rend le sol perméable à l’air, et y maintient l’humidité. Par conséquent il agit énergiquement sur la végétation en facilitant la décomposition des engrais et en accélérant l’ascension de la sève. C’est là son principal but, le binage est aussi efficace qu’un bon labour sur la végétation, la destruction des herbes n’est que très secondaire.

Tout ce qui n’est pas paillé dans le potager doit être très fréquemment biné, surtout après les arrosements qui battent la terre, et forment à la surface une croûte dure et sèche.
Cette croûte superficielle est très nuisible à la végétation, surtout dans les sols un peu compacts. Elle empêche d’une part l’air de pénétrer, et s’oppose par conséquent à la décomposition des engrais. De l’autre, cette croûte dure et desséchée arrêtant l’évaporation, il n’y a plus d’humidité à la surface. Aussitôt la croûte superficielle brisée, l’air pénètre le sol, et l’évaporation se rétablissant, l’humidité du fond remonte à la surface, par l’effet de la capillarité, et apporte aux racines la fraîcheur dont elles étaient privées.

Il est impossible de déterminer le nombre des binages, et l’époque à laquelle il faut les donner. Cela est subordonné à la nature du sol, à sa consistance, et aussi à la température.

Il est évident qu’il faut biner plus souvent dans un sol argileux que dans un sol léger, la terre s’y croûte plus vite, et sa cohésion est telle qu’elle se fend pendant la sécheresse.

Les binages doivent être plus fréquents dans tous les sols : quand la température est très élevée, un bon binage est plus efficace qu’un mauvais arrosement, surtout s’il est mal appliqué. Une petite quantité d’eau jetée brusquement bat la terre sans la mouiller et ne fait qu’augmenter l’épaisseur de la croûte superficielle.

Les binages sont indispensables après les arrosements, car, quelque bien administrés qu’ils soient, ils déterminent toujours la formation d’une croûte à la surface du sol, et il est de toute nécessité de la briser pour que les arrosages soient fructueux.

On pratique le binage avec la binette dans les planches et les carrés de légumes plantés à de grandes distances, et qui s’arrosent peu. La binette est un instrument très expéditif, mais imparfait, il ne pénètre pas assez profondément et n’ameublit pas suffisamment le sol. L’emploi de la binette dans le potager doit se restreindre aux pommes de terre; pour toutes les autres cultures nous employons de préférence la serfouette.

La serfouette est l’instrument le plus parfait pour biner dans le potager; on coupe les mauvaises herbes entre deux terres avec la lame, et ensuite on donne avec le crochet un hersage énergique, qui ameublit complétement le sol. Avec ce même crochet on remue profondément la terre tout autour des racines sans les endommager ni même les ébranler.

Il est urgent d’avoir deux serfouettes à crochet, une grande pour les légumes plantés loin, et une petite pour les semis en ligne, les repiquages, et toutes les plantes très rapprochées, demandant d’autant plus de binages qu’on les arrose plus fréquemment. Avec le crochet on bine une planche en un instant, et il est urgent de le faire souvent, toutes les fois qu’il se forme une croûte à la surface du sol quand il n’est pas paillé.

Je ne saurais mieux résumer cet article qu’en disant que le binage est l’échelle de la production du potager, et que sans biner, les engrais et les arrosages perdent plus de la moitié de leur efficacité.