Graines : récolte et conservation des graines

Comment bien récolter et conserver les graines du jardin

Les meilleures graines sont celles qui ont été cueillies dans leur maturité parfaite, qui sont pesantes, qui ne sont pas ridées, dont la couleur naturelle n’a pas subi d’altération.

On a prétendu que les graines avaient besoin d’être dépaysées. Ainsi, il serait à propos de ne pas semer une graine dans le lieu même où elle a été recueillie, et où les plantes qui en proviendraient tendraient à la dégénération. Mais, comme il arrive trop souvent que l’on est exposé à être trompé sur la qualité, l’âge et même les variétés, quand on achète des graines; comme il y a d’ailleurs de l’économie à faire le moins d’emplettes qu’il est possible; comme il est toujours commode d’avoir ces objets sous sa main pour le besoin, nous conseillons aux cultivateurs de réserver parmi leurs plantes les individus les plus beaux pour en cueillir les semences. Nous croyons que ces graines, sur la qualité et l’âge desquelles on ne saurait être trompé, valent au moins les graines dépaysées. L’essentiel est de les recueillir bien mûries, de les conserver très sèches dans des sacs de papier ou de toile, à l’abri de l’air, de la chaleur et des insectes.

récolte graines

Quant à celles des graines que l’on peut semer dès qu’elles sont mûres, leur germination est plus prompte et leur développement plus vigoureux que ceux des graines conservées.

Les plantes qui en proviennent sont d’ailleurs plus précoces et plus belles. Tels sont les pieds-d’alouette, les pois de senteur et une foule de ces fleurs qui n’ont rien à redouter des hivers ordinaires.

On conservera donc de bons porte-graines, ne fût-ce que pour en échanger les produits avec quelques cultivateurs dont on connaît la probité et les bons soins.




Ces porte-graines exigent quelque attention. Ils seront placés en belle exposition pour que les semences puissent bien mûrir, et à portée de surveillance pour que l’on puisse écarter les oiseaux qui se jettent avec avidité sur plusieurs espèces de graines, telles que les salsifis, les pois, etc… On doit aussi établir, à la plus grande distance dont on peut disposer, les porte-graines de nature analogue, parce que ces végétaux, à l’époque de leur floraison, confondant leurs étamines, introduiraient des altérations dans les bonnes variétés, qui pourraient en être dépravées. Ainsi, les Melons, les Citrouilles et d’autres cucurbitacées, les Laitues, les Raves et les Radis, etc…, sont très exposés à cet accident, si on n’éloigna beaucoup les porte-graines qui doivent les reproduire.

Les porte-graines, mis en réserve de bonne heure, et plantés avec soin en terre fertile et à bonne exposition , exigent une culture attentive : ils seront arrosés, serfouis et sarclés convenablement. A l’approche de la maturité, on enveloppera d’un filet ceux qui peuvent redouter la voracité des oiseaux, et l’on enlèvera, un peu avant qu’elles soient complètement mûres, les graines qui, pourvues d’ailes légères, pourraient être emportées par les vents.

graines du potager recolte

Autant qu’on le pourra, on les laissera compléter leur maturité en les exposant au soleil, à l’air sec, et en les remuant de temps en temps. Si la quantité qui est nécessaire n’est pas trop considérable , on laissera jusqu’à l’ensemencement, toutes ces graines dans leurs gousses ou leurs balles; elles s’y conserveront beaucoup mieux que mises à nu dans des sacs ou dans des boites.

Pour quelques semences, cette précaution ne saurait être employée. Les pépins des Cucurbitacées doivent être extraits du fruit ou pulpe qui les contient. On le laisse mûrir parfaitement, et même commencer à pourrir, afin que les graines en soient meilleures. On les fait sécher à un soleil modéré et à l’air libre, avant de les enfermer dans des sacs de papier gris. Il ne faut pas les laver, l’enduit gommeux qui tapisse leur enveloppe sert à les mieux conserver.

Toutes les semences, soit dans leurs gousses, soit dans leurs balles, soit dépouillées et nettoyées, seront placées sèchement et sainement dans des sacs, des cornets ou des boîtes bien fermées, mises à l’abri de l’air, de la lumière, de l’humidité et des insectes, jusqu’à ce qu’on juge à propos de s’en servir. La température du lieu où l’on conservera les graines, doit être plutôt froide que chaude, parce que cette chaleur accélérant un commencement de végétation, en fesant fermenter les principes huileux de quelques-unes d’entre elles, altérerait considérablement leurs germes.




Quoi que l’on fasse, ces précautions ne sont pas toujours suffisantes : quelquefois il arrive que de petits insectes, d’abord inaperçus, viennent à se développer, et se multiplient même au point de dévorer des sacs entiers de graines. Pour prévenir ce grave inconvénient, il sera à propos de les visiter de temps en temps, et de les vanner pour les nettoyer.

Les Pommes de terre exigent des soins particuliers. Elles seront mises à l’abri de l’humidité qui les ferait pourrir, de la chaleur qui accélérerait trop leur germination, et de la gelée qui les réduirait en une eau corrompue, qui ôte à ces tubercules la faculté de la reproduction.

Les semences dures , telles que les Noyaux, les Noix, les Amandes, et toutes celles qui tarderaient trop à lever si on se bornait à les mettre en terre au printemps, seront stratifiées dans une cave au moyen de sable légèrement humide, dont on les couvrira dès le mois d’octobre, et jusqu’à ce qu’on les sème en avril, en ayant soin de ménager les germes, les racines et les cotylédons qui se seraient développés. Cette stratification doit être mise à l’abri de la voracité des rats et des souris, et ne sera visitée qu’avec beaucoup de précautions, afin de ne rien briser.

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Si l’on voulait conserver plusieurs années, ou envoyer fort loin quelques graines, dont la plupart sont délicates au point de craindre les diverses variations atmosphériques, il serait à propos de les établir bien sèches, par petits paquets enveloppés soigneusement avec du papier gris, bien ficelés, bien clos, et enfermés dans de bonnes boîtes très saines, et même rembourrés de coton ou de mousse.

Les bonnes graines se reconnaissent à leur poids, quelques-unes à leur odeur, et toutes à leur grosseur et à leur belle apparence. C’est de ces graines qu’il faut nécessairement faire un choix sévère, si l’on veut avoir des productions qui réunissent la beauté à la bonté.

Les graines nettoyées seront enveloppées, datées, étiquetées, afin de pouvoir reconnaître, par l’époque de leur récolte, l’âge qu’elles ont lorsqu’on les sème. On sait que plusieurs de ces graines sont plus recherchées au bout de quelques années que dans celle où elles ont été recueillies. Quoi qu’il en soit, les graines les plus récentes sont en général les meilleures, à moins que la mauvaise saison ne les ait empêchées de parvenir à une maturité parfaite, ou que quelque circonstance ne les ait altérées.

C’est à tort que quelques jardiniers, esclaves des vieilles pratiques, croient accélérer la germination de leurs graines, et même en perfectionner les produits, en les faisant tremper dans l’eau et dans quelques préparations. C’est un soin au moins inutile, ainsi que l’a remarqué un praticien éclairé (De Combles). Voici ce qu’il dit à ce sujet :
« Avant de semer les Fèves , beaucoup de personnes les font tremper, soit dans l’eau naturelle, soit dans l’eau de fumiers, dans l’opinion que cela les fait plutôt germer et lever. Pour moi, qui en ai fait l’expérience pour ma règle, le seul effet que j’en aie aperçu, c’est qu’après les avoir ainsi trempées, il en pourrissait beaucoup en terre qui ne levaient pas, et que les autres n’avançaient pas davantage.  »

Voici l’état de la durée des semences, pendant laquelle on peut, sans inconvénient, en faire usage. Il est inutile de faire observer que ces données ne peuvent être qu’approximatives, puisque la durée de la force végétative des graines dépend de leur bonne constitution, de leur maturité parfaite, de leur récolte soignée, et d’une conservation telle qu’elles n’aient eu rien à redouter de l’air, de la lumière, de la chaleur et de l’humidité. On a souvent vu lever parfaitement, au bout de nombreuses années, des semences retrouvées dans la terre à une grande profondeur, où elles s’étaient conservées à l’abri des influentes météoriques qui les auraient altérées.

La germination aussi dépend de beaucoup de circonstances. Telle graine qui lève en trois jours dans un bon terrain, grâce à une chaleur et à une humidité convenables, emploiera, lorsque ces avantages lui manquent, quelquefois jusqu’à huit ou dix jours avant de développer ses racines et ses feuilles.

Ainsi, quand nous parlons de la germination, nous supposons les circonstances les plus favorables; et pour la durée des graines, nous fixons un terme ordinaire dépendant des soins de conservation que nous avons prescrits.
Non stratifiées dans le sable , les semences de l’Amandier à coque dure, du Pêcher et du Châtaignier, ne lèvent qu’au bout d’un an à quinze mois; celles de l’Aubépine, du Noisetier, du Néflier, de l’Avelinier, du Cornouiller et du Rosier, ne sortent de terre qu’au bout de deux années. Les pépins n’ont pas besoin d’être stratifiés; ils lèvent en moins d’un mois, ainsi que les Amandes à coque tendre.

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