Culture des fèves aujourd’hui.
Culture des fèves selon nos anciens
— La fève réussit dans tous les terrains bien fumés, mais elle se plaît et donne de meilleurs résultats dans les terres franches un peu fortes.
On commence à semer les premières fèves, en octobre et successivement de quinzaine en quinzaine jusqu’en mars, et cela afin de n’en point manquer. Car on ne les mange guère qu’en vert et à demi formées, et les semis successifs permettent d’en jouir assez longtemps, et d’en tirer bon profit.
On les dispose par rayons à 40 ou 50 centimètres selon les terrains, ou en planches de quatre lignes à 35 ou 40 centimètres. On observe un sentier de 60 centimètres. On sème à 50 centimètres, sur la ligne, plus éloigné si cela est nécessaire quand le terrain est bon, car dans ces sortes de plantes il faut éviter la confusion, qui les fait étioler et retarde la production précoce.
Le plus souvent, on trace les lignes au traçoir ou on ne fait que tendre le cordeau, puis on sème les fèves en les enfonçant avec le pouce à 5 centimètres environ, ou avec un plantoir peu effilé.
Dans l’un comme dans l’autre cas, on ramène un peu de terre pour les recouvrir.
Dans le Sud-Ouest, les agriculteurs sèment les fèves par sillons, de 70 ou 80 centimètres au moins, ils mettent quatre ou cinq rangs dans chaque, ce système n’est pas mauvais en ce sens que les plantes, quoiqu’un peu serrées, reçoivent quand même de l’air et ne s’étiolent pas. La production est en général très bonne.
Lorsque les fèves auront atteint 7 à 8 centimètres de haut, on donne un premier binage léger, que l’on effectuera lorsque toute trace de rosée aura disparu. On renouvelle cette opération à quelques semaines d’intervalle.
La fève ne doit en aucun cas être arrosée, car la grande humidité la fait jaunir.
Lorsque cette plante aura atteint environ 35 à 40 centimètres de hauteur, on en pince l’extrémité, cette hauteur coïncide ordinairement avec la dixième ou douzième feuille et l’on pince au-dessus.
Cette opération a pour but d’arrêter le mouvement ascensionnel du sujet et de refouler la sève dans les parties inférieures; ce qui avance beaucoup la formation des fruits.
Dans l’Angoumois, la Saintonge et le Quercy, on sème les fèves par petits sillons avec la houe fourchue ou plate, cette manière d’opérer n’est pas mauvaise, mais elle ne peut s’appliquer à tous les sols.
Graines de fève.
– Pour récolter de la bonne semence, on doit en semer dans cette intention, c’est à dire traiter les sujets avec les soins
de culture que nous avons indiqués, mais laisser tous les fruits, ne pas en cueillir, car les premiers formés sont les meilleurs
et les plus hâtifs. On laisse sécher les pieds sur place, puis on les rentre, et quand il fait mauvais temps on les écosse.
La graine se conserve bonne pendant cinq ou six ans. Nous conseillons cependant de choisir de préférence de la semence
de l’année précédente. 500 grammes contiennent environ de 250 à 300 fèves, le litre pèse 620 grammes.
Maladies des fèves, Animaux nuisibles.
— Quelquefois dans les terrains maigres, les fèves sont atteintes de rouille ou uredo.
Il est difficile de détruire cette maladie, qui envahit rapidement les plantes, le remède que nous avons indiqué pour les chicorées est le seul qui nous ait donné de bons résultats.
Le plus cruel ennemi de la fève est le puceron noir (Aphis nigra), qui se développe plus spécialement sur la partie supérieure de la tige, mais si on a la précaution de pincer assez tôt, sa marche est entravée ; plusieurs remèdes ont été essayés, aucun n’a produit d’effet, la nicotine seule semble avoir donné quelques résultats.
Que faire avec les fèves.
— Les fèves sont une ressource précieuse pour l’alimentation, on doit même regretter que leur usage ne soit pas plus répandu, il pourrait être d’un grand secours pour les classes peu aisées.
Les fèves sont très nourrissantes, de même que les haricots et les lentilles, elles renferment une proportion assez considérable d’une matière azotée, la lègumine, qui a une grande analogie avec la caséine animale et qui contribue beaucoup à leurs qualités nutritives.
Cueillies avant leur complète maturité, alors qu’elles sont encore vertes et qu’on les fait sécher, on a un produit moins abondant, mais plus nourrissant encore.
Les jeunes pousses se mangent en salade et sont employées dans les soupes maigres.
La fève est fréquemment employée pour engraisser les animaux, elle peut avantageusement remplacer l’avoine pour les chevaux; on en fait de la farine qui est excellente pour le breuvage des animaux et les engraisse rapidement. Dans certains pays, on la mêle à la farine de blé.
L’odeur suave des fleurs de la fève les a fait employer en parfumerie sous forme d’eau distillée ; on se sert de cette eau comme de cosmétique, ainsi que de la farine de fèves à laquelle on a attribué la propriété de faire disparaître les taches de rousseurs.
En Angleterre, on fait cuire les fèves avec du miel, et on les emploie comme appât pour prendre les poissons.
Les tiges sèches donnent beaucoup de potasse par l’incinération.
Variétés.
– Fève d’Aguadulce à longues cosses. — C’est une des meilleures variétés à cultiver dans les jardins, les cosses sont très longues, de 35 à 40 centimètres sur 4 centimètres d’épaisseur,elle convient particulièrement pour la vente en vert.
Fève de Séville. — Variété hâtive à très longues cosses, très recommandable pour la vente en vert.
Fève de Windsor. -Variété rustique à cosses courtes et nombreuses, ne contenant que deux grains.
Fève Julienne. — Variété à cosses nombreuses ne contenant que trois grains, elles sont dressées et réunies par trois et quatre; très rustique, très bonne pour engrais vert.
Fève Julienne verte. – Se distingue de la précédente variété par la couleur verte de son grain, elle est plus tardive.
Fève naine hâtive à châssis. – Variété tout à fait naine, elle ne dépasse pas 35 ou 40 centimètres de hauteur, cosses petites, dressées très nombreuses, réunies par deux ou trois, contenant deux ou trois grains, carrés, épais, renflés. Elle convient pour la culture hâtive et forcée.
Fève de Mazagran. – Variété très bonne pour la grande culture, cosses nombreuses à petits grains.
Planter les fèves
Ce légume, délicat lorsqu’il est mangé jeune encore, est toujours utile, soit pour les hommes , soit pour les animaux ; il est robuste , et se plait surtout dans les terres compactes. On peut même le cultiver à l’ombre. Dans les hivers qui ne sont pas rigoureux, semé en décembre ou en janvier, il prospère et donne ses gousses dès le mois de mai ou de juin. Toutefois, excepté une petite quantité que l’on risque , on ne doit semer la Fève qu’en février ou même au commencement de mars. Quand le sol est léger, on marche sur les Fèves, on les piétine aussitôt qu’elles sont mises en terre , afin d’affermir les racines du plant. Quand on désire manger de jeunes Fèves à différentes époques de l’année , il est utile d’en semer jusqu’en juin. Après les avoir cueillies , et lorsque la tige est restée verte et vigoureuse, surtout si le terrain est frais et la température un peu humide, on peut se borner à couper les pieds à leur base : ils repousseront de nouveaux jets qui produiront une seconde récolte souvent assez abondante. Il faut aux Fèves un terrain profond et gras, bêché à fond , et engraissé plutôt avec le terreau qu’avec le fumier.
On sème les Fèves en rayons, à la profondeur de cinq à douze centimètres, selon la nature du terrain, c’est-à-dire à cinq dans les terres fortes et douze dans les terrains légers; on met trente centimètres de distance entre chaque Fève. Quand on n’est pas sûr de la bouté des graines, on les plante deux à deux , sauf à arracher la tige la plus faible lorsqu’elles sont levées. Quelques jardiniers sèment leurs Fèves par touffes composées chacune de trois ou quatre graines , et distribuent ces touffes à une distance de quarante centimètres les unes des autres. Comme pour les rayons ( qui sont préférables ), on serfouit et on pince. Dès que le jeune plant a acquis la hauteur de dix centimètres, il faut, avec une petite houe ou binette, le rechausser, en ramenant au pied des tiges une partie de la terre qui se trouve entre les rayons. Cette opération a le double avantage de détruire les mauvaises herbes, et de soutenir les Fèves. Ce binage ne doit avoir lieu que deux fois, et toujours de manière à profiter d’un temps sain ou du moins peu humide, et avant que la plante devenue grande ait à craindre d’être endommagée par les outils et par les mouvements du jardinier. On doit en général, avec cette petite houe, entretenir le plus meuble qu’il est possible, sans toutefois offenser les racines, la terre qui avoisine les plantes : ce travail , répété tous les quinze jours , économise le sarclage, est moins pénible que lui, et conserve au sol cette porosité, cette légèreté qui y facilite l’introduction de la chaleur , de l’air et de l’humidité , agents toujours nuisants de la végétation.
Dans les grandes exploitations , dans les champs, la Fève est abandonnée à elle-même, et ne produit qu’une partie de ce qu’on a droit d’en attendre avec un peu de soin. Aussitôt que les premières fleurs de la Fève commencent à se flétrir, il faut couper avec les ongles la sommité de la plante, c’est-à dire en enlever environ douze millimètres. C’est ce qu’on appelle arrêter les Fèves, ou les pincer : à ce moyen, la tige devient plus vigoureuse, et un plus grand nombre de fleurs fructifient. Quelques ouvrages recommandent de ne pincer la Fève que lorsque les fleurs sont entièrement passées ; c’est à tort, car, si l’on attendait que les fleurs du sommet fussent même épanouies, la plupart des fleurs inférieures , les premières, celles qui sont plus près du sol, auraient déjà coulé , et ne donneraient pas de fruit. Il importe donc de pincer plus tôt. On recueille dans une corbeille les pointes de la Fève , pour les brûler, parce qu’elles sont presque toujours couvertes de pucerons, que l’on empêche ainsi de se multiplier et de se jeter sur toutes les cultures du jardin. Sans l’opération du pincement de la Fève, qui lui enlève douze à trente millimètres, elle produirait moins et ses fruits seraient moins beaux.
Lorsqu’on a recueilli les Fèves, si elles sont jeunes, les tiges sont bonnes pour les bestiaux , peuvent produire un bon fumier ou donner au feu une cendre abondante; si elles sont mûres, les tiges desséchées ne peuvent servir qu’au chauffage: on les brûle, soit au foyer, soit au four. Il en est de même des tiges des Haricots et des Pois.
Pour obtenir de bonnes graines, on laisse quelques tiges venir à maturité, choisies parmi les plus vigoureuses , et placées commodément afin de ne pas nuire aux autres cultures. On peut consacrer un endroit déterminé du jardin pour y établir les individus des plantes dont on désire obtenir les semences pour la reproduction. La maturité des gousses de la Fève se reconnaît à la couleur noire qu’elles prennent. On en fait la récolte par un temps sec, et l’on suspend les tiges dans un grenier à l’air libre, pour que la maturité se complète ; puis on détache les gousses bien sèches pour ne les ouvrir qu’à l’époque de l’ensemencement que l’on se propose d’en faire. Toutefois, si l’on craint, ce qui ne manque guère d’arriver, que les bruches du pois attaquent les Fèves, on les écosse , de temps en temps on les vanne pour les nettoyer de plus en plus, et en écarter ces insectes dévorants. Au reste, à moins que le germe ne soit détruit, la Fève percée à jour n’en est pas moins bonne pour les semailles.
Culture de la fève
Le tempérament de cette plante est si robuste, qu’elle réussit à peu près dans tous les terrains. Dans le midi de la France, on sème les fèves en octobre; les hivers très doux ne peuvent les endommager; dans les départements du Nord, on les sème en avril, et, dans ceux du Centre, en février ou en mars. Sous ce climat, il ne faudrait pas retarder cette semaille après le mois de mars ; autrement les jeunes pousses de la plante se trouveront, en été, en proie aux pucerons noirs, dont il sera très difficile de les délivrer. Cet insecte se multiplie avec une si prodigieuse rapidité, que, si l’on ne prend soin d’enlever chaque jour le sommet des touffes qui en sont infestées, la plante entière ne tarde pas à périr d’épuisement.
Les fèves se sèment, soit en lignes, soit par touffes; dans un cas comme dans l’autre, les plantes doivent être suffisamment espacées entre elles pour que l’air et la lumière y circulent librement, sans quoi les fleurs couleront et ne donneront aucun produit.
Pour utiliser le terrain dans les intervalles des lignes de fèves, on peut y semer des pois ou bien y planter des pommes de terre. On peut aussi, au lieu de former des planches entières de fèves, les semer en bordure autour des carrés de choux. Pour les semer en ligues, on ouvre des raies de 8 à 10 centimètres de profondeur; les fèves y sont déposées à environ un décimètre les unes des autres. Lorsqu’on sème par touffes, on ouvre des trous à la houe, espacés entre eux de 30 à 35 centimètres en tous sens; on dépose dans chaque trou 4 ou 5 fèves qu’on recouvre très légèrement; on ne doit pas employer plus de trois litres de semence par are. Quand les fèves sont bien levées, on donne un premier binage; alors seulement on achève de remplir les trous.
Lorsque les fèves sont cultivées en terre légère, il est utile de pratiquer un buttage qui donne aux plantes plus de vigueur. Dès que les fèves sont défleuries, on pince toutes les sommités afin de forcer la sève à tourner au profit de la production des semences. Dans la culture maraîchère parisienne, l’on n’arrose pas habituellement les fèves, cependant, en cas de sécheresse très prolongée, il serait avantageux de leur donner un peu d’eau de temps à autre , comme on le fait dans le midi de la France.
Les fèves qu’on se propose de consommer en hiver comme légume sec ne doivent pas sécher sur pied; ou les arrache dès que les cœurs commencent à noircir; elles restent sur le sol pendant huit à dix jours, au bout desquels on les lie par petites bottes que l’on conserve, soit dans un grenier ou dans une grange, soit en meules comme les céréales.
Un are de terre de fertilité moyenne, dans les circonstances ordinaires, produit de 25 à 30 litres de fèves sèches. Quand cette récolte est enlevée, on peut encore obtenir du même sol une récolte de navets.
En Hollande, où, en raison de la longueur des hivers, on est privé de légumes frais beaucoup plus longtemps qu’en France, on sait conserver aux fèves pendant un an.et même au delà les qualités qui les font rechercher pendant leur primeur; le procédé mis en usage à cet effet est simple et peu coûteux. Les fèves sont récoltées au point où l’on est dans l’usage de les cueillir pour les manger en vert; on les écosse immédiatement, puis on les étend sur des plaques de tôle garnies de papier blanc, que l’on place dans un four chauffé, comme pour faire sécher les choux, à 25 degrés environ. Quand leur dessiccation est complète, on les conserve dans une boîte hermétiquement fermée. Toutes les espèces de fèves peuvent être soumises à ce procédé de conservation; mais celles dont le grain est petit sont généralement plus estimées que celles dont le grain est volumineux. De même que toutes les graines légumineuses qui se consomment en sec, les fèves séchées au four veulent être trempées pendant quelques heures dans l’eau avant de les faire cuire.
Graines. — Les fèves destinées à servir de semences sont prises parmi celles qu’on réserve pour les manger comme légume sec ; lorsqu’on les laisse dans leurs cosses desséchées , elles y conservent pendant cinq ou six ans leurs propriétés germinatives.